Aménagement d’un espace de vente dans le métavers : annulation de la décision de rejet de la marque de l’UE

Une demande de marque a été déposée à l’EUIPO pour une marque de forme, consistant en 6 vues en perspective de l’aménagement d’un espace de vente, pour désigner des services en classe 35, notamment des services de vente de produits virtuels. Sur les vues on peut voir en particulier un comptoir et 3 meubles qui forment un espace triangulaire autour du comptoir.


La demande est rejetée pour défaut de caractère distinctif, le consommateur n’étant pas habitué à distinguer un service commercial par la disposition d’un magasin. L’examinateur indique 2 liens internet pour montrer qu’un point de vente peut prendre différentes formes.

Dans ses observations, le demandeur soutient que la marque est distinctive car elle se différencie de façon substantielle des normes du secteur, en particulier par l’agencement des meubles autour du comptoir qui, contrairement aux normes du secteur des espaces de vente, ne facilitent pas le flux des consommateurs.

L’examinateur se réfère à l’arrêt C421/13 Apple Store, dans lequel la Cour de Justice a jugé que l’aménagement d’un espace de vente peut être enregistré à titre de marque s’il est doté d’un caractère distinctif, ce qui nécessite de montrer qu’il s’écarte considérablement de la norme du secteur.

Selon l’examinateur, le fait que plusieurs magasins privilégient de faciliter le flux des clients ne permet pas de montrer que d’autres magasins ne s’écartent pas de cette norme. La demande de marque est alors rejetée.

Un recours est formé contre la décision de rejet.

La Chambre de Recours confirme que pour l’examen d’une marque de forme, la première étape est de déterminer le secteur pertinent, puis d’identifier les normes et les habitudes de ce secteur et, enfin, de décider si le signe contesté diverge de manière significative de celles-ci. Cette démarche s’applique aux marques de forme pour des aménagements d’espaces de vente,

Pour la Chambre de Recours, cet examen n’a pas été fait par l’examinateur et la décision n’est pas motivée. En particulier :
✖️ les normes et habitudes du secteur n’ont pas été identifiées ;
✖️ l’examen ne distingue pas les différents services désignés et se borne à indiquer qu’il s’agit de services commerciaux,
✖️ l’examinateur n’a pas examiné les services désignés dans le métavers, or rien n’indique dans quelle mesure l’expérience des points de vente traditionnels peut être transposée au monde virtuel ;
✖️ l’examinateur s’est contenté d’indiquer des liens internet, qui ne peuvent être acceptés comme éléments de preuve.

La Chambre de Recours annule la décision et renvoie l’affaire à l’examinateur.

Le demandeur saura-t-il profiter de cette occasion pour démontrer que son agencement se distingue des normes du secteur ?

R 2049/2024-1 du 14/02/2025